Témoignages
Je ne devais pas être instruite !
Je suis Touarègue de père et mère et j'ai 49 ans.
J'ai été à l'école mais mon école s'est arrêtée quand je devais entrer en 3e, quand mes parents se sont aperçus que je n'avais pas le droit de continuer. Je ne devais pas être instruite ! Cela allait faire de moi une femme qui ne respecterait pas la coutume : mariée à 16 ans.
J'ai toujours voulu faire d'autres formations mais je n'y ai jamais été autorisée car comme toutes les filles de mon âge, je devais être femme au foyer, être à l'écoute de mon mari et faire des enfants, pas mieux que cela dans ma coutume ! Je n'ai eu mon autonomie qu'après 20 ans de mariage. J'ai divorcé avec 6 gosses, 4 filles et 2 garçons. J'ai mené ma vie avec mes enfants en leur jurant qu'ils ne seraient pas comme moi! Ma 1re fille est actuellement à l'école supérieure de l'agriculture, Agrimat 2e année après son bac. La 2e s'est mariée après le brevet. La 3e a eu son bac il y a 4 ans; elle suit des études à l'université de Niamey. La 4e après son bac, fait l'école de communication.
Le 5e est dans la police et le 6e est en 3e et fera son brevet. Et moi, je travaille aujourd'hui comme responsable des filles à Grain de Sable auxquelles, je transmettrai tout mon savoir sur l'éducation de la fille moderne et ce qu'il faut pour arriver. Mais la tradition empêchera malheureusement certaines de choisir leur vie!
Mariama Ramada,
Responsable à la Maison des Filles de Grain de Sable, d'Agadez
Avant cette Association, notre scolarité était incertaine.
Bonjour Monsieur le Président,
Je me fais un devoir de vous écrire aujourd’hui pour vous faire part de mes sentiments.
Pendant 4 longues années vous avez été présent dans notre cœur et notre esprit à travers les œuvres que vous réalisez en notre faveur.
Avant cette Association, notre scolarité était incertaine et beaucoup de nos frères ont abandonné faute de tuteurs. Voilà qu’aujourd’hui, Dieu merci, on a bénéficié d’un hébergement tout au long de notre cycle. Grâce à votre initiative, celle d’aider les jeunes issus des zones rurales à continuer leurs études, aujourd’hui, notre scolarité prend un élan plus considérable et plein d’espoir.
J’ai la conviction que tous ces jeunes vous sont reconnaissants. Les résultats ne sont pas satisfaisants mais on fonde toujours espoir sur la place du Centre dans notre lycée, car tous les résidants sont capables de tenir tête à leurs camarades.
Pour mon cas, l’expérience que j’ai acquise ici m’a permis de voir loin et de me mettre au travail parce qu’on a besoin de moi. Cette expérience est le fruit du Centre et des échanges d’idées avec vous.
Recevez, Monsieur, ma profonde gratitude et l’expression de tout mon respect et mes remerciements.
Cependant, Monsieur, je serai plus heureux si le lien qui nous unit continue toute la vie. Ce n’est pas parce qu’on quitte le Centre que tout est fini. Au contraire, c’est maintenant que ça commence.
Pour terminer, transmettez tous nos respects et notre profonde gratitude à vos collaborateurs, aux membres du Conseil ainsi qu’aux adhérents de l’Association.
Votre ami de tous les temps
M’Bareck, bachelier juin 2010
Lettre de remerciements du 10 juillet 2010
M'Bareck a passé sa licence de Lettres Modernes en 2013 et entre en 2ème année de Master Français et Gestion, et en 2ème année à l'Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature (ENAM).
Oui, c’est difficile, mais ça vaut le coup...
Actions de Grain de Sable au nord Niger (Agadez) de 1995 à 2012
C’était depuis 1995, du vivant de Mano Dayak, qu’une mission de quelques membres de Grain de Sable, dont le Président, a sillonné les oasis de Tidène, Boudari, Arous, Sakafat, Tibouhete et Tchissawaten situées à 120 – 140 km au nord d’Agadez.
Cette mission a constaté que ces régions étaient enclavées, sans école, sans dispensaire donc ne pouvaient prétendre au développement sans l’instruction.
C’est pourquoi, Grain de Sable s’est engagé dans la scolarisation des fils et filles des éleveurs et maraichers peuplant les oasis précitées.
En 1996, furent ouvertes 4 écoles (classes en paillotes) : Arous, Sakafat, Tibouhete et Tchissawaten par l’association Grain de Sable.
Après 3 ans de fonctionnement, les écoles d’Arous et de Tibouhéte ont fermé à cause des problèmes politiques, claniques et des mauvais résultats scolaires. Car ces régions étaient divisées par le multipartisme que la population ne comprenait pas et en faisait une adversité.
Les écoles de Sakafat et Tchissawaten ont continué malgré vents et marées.
Grain de Sable a concentré ses actions à Sakafat qui devient un pôle de développement avec le début de plusieurs activités de développement autour de l’école telles que : alphabétisation des adultes hommes et femmes, regroupements en coopératives, ouverture d’une case de santé, construction en banco des classes, dortoirs, logements d’enseignants, case de santé.
Au temps où la paix régnait, jusqu’à 2006, l’association se rendait chaque année à Sakafat au mois d’octobre pour une mise au point des activités lancées l’année précédente et la relance de nouvelles autres, sans oublier les bonnes retrouvailles et échanges avec les villageois. Cela rassure les deux partenaires et permet d’avancer dans le bon sens malgré la non participation entière de la population qui était certes entravée par de nombreux maux dont les plus illustratifs : ignorance, pauvreté, …
Connaissant Sakafat et sa population depuis le 6 octobre 1998, j’affirme aisément que Grain de Sable a investi beaucoup pour développer cette région (plus de 30.000.000 de Frs CFA environ).
Ces investissements ne sont pas vains car les élèves de Sakafat s’échelonnent de CI à l’Université, le développement social et économique est visible par rapport aux années 1996. Les résultats seraient meilleurs si la population avait entièrement participé.
L’une des principales œuvres de Grain de Sable à Agadez est le Centre d’Accueil où se trouvent les jeunes ruraux qui continuent leurs études au lycée. Les 28 résidents reçus au bac ne l’auraient jamais été si Grain de Sable ne les assistait pas car ils sont issus de familles pauvres qui méconnaissent les bienfaits de l’école et préfèrent faire travailler leurs enfants pour faire paître les animaux ou travailler aux jardins. C’est une lutte pour inscrire les enfants des nomades à l’école mais Grain de Sable mène une lutte plus difficile, celle de récolter l’argent pour le fonctionnement des Centres d’Accueil et autres activités.
C’est le lieu de présenter ici, au nom des populations concernées, toute notre gratitude à tous les adhérents et membres de Grain de Sable pour les efforts inlassables qu’ils font pour continuer leur œuvre.
Oui, c’est difficile, mais ça vaut le coup. Du courage, beaucoup de courage car le chemin est long et plein d’obstacles.
Alhousseini Albougounou, Directeur du Centre d’Accueil d’Agadez
Comme dans une famille on sait ce qui s'y passe !
J ’apprécie de plus en plus Grain de Sable : cette petite association à taille et visage humains. Comme dans une famille on sait ce qui s'y passe,ce que font ceux qui l'animent et la font avancer, et ceux qui en bénéficient, comme nous l'ont dit les témoignages des lycéens.
C'est aussi la raison pour laquelle je parraine moi aussi, mais j'ai demandé que ce soit une jeune fille. Je suis sûre que l'évolution des mentalités passe par l'instruction des filles, non par simple féminisme, mais parce que cette évolution ne peut se faire si la moitié de la population vit avec des mentalités d'un autre âge. Je ne suis jamais allée au Niger et pourtant il me semble le connaître un peu ; et j'ai envie d'aider ces jeunes, sur qui nous fondons tant d'espoirs, à sortir leur pays du marasme où il se trouve.
Geneviève à Albi
Etre une femme au Niger, c'est lutter chaque jour !
La première fois que je suis allée au Niger, j'avais 25 ans. C'était en 1997, avec Pierre Lecut et ma sœur Cécile qui en avait 21.
À 25 ans, une femme nigérienne est mariée depuis plus ou moins 10 ans, déjà maman de 4 ou 5 enfants «vivants» (la précision est de taille, le taux de mortalité infantile étant encore de 124,5 décès pour 1000 enfants âgés de moins de cinq ans). À 35 ans, être une grand-mère enceinte est fréquent. Le seuil de tolérance des violences faites aux femmes est pour le moins hétérogène selon les lois et les cultures...
Un peintre nigérien à Niamey avait bien saisi le courage et la force d'une femme nigérienne dans son tableau, en la symbolisant par un Bouddha à 8 bras, chaque bras représentant une tâche quotidienne. Être une femme au Niger, c'est lutter chaque jour. Lutter pour rester à l'école le plus longtemps possible, lutter contre un mariage et les naissances précoces, puis lutter pour ses enfants, lutter contre la chaleur harassante dans les champs ou aux pâturages, lutter pour trouver de l'eau et du bois dans un pays où la désertification est en marche. C'est chaque jour lutter contre toutes formes de violences et de discriminations faites aux femmes: le refus du mari d'accorder un accouchement assisté par du personnel de santé qualifié, d'accéder aux moyens d'espacer ses naissances, la non-scolarisation des filles au profit du travail des fillettes, l'accès aux terres et aux ressources, la polygamie, la radicalisation de la religion importée par les pays arabes du Moyen-Orient qui aimeraient que toutes les femmes disparaissent sous le niqab. Mais être une femme nigérienne, c'est aussi être digne, immensément généreuse, capable à la fois de renoncement et d'une volonté forcenée. Le combat que porte Grain de Sable pour la scolarisation des filles est déterminant pour l'avenir du Niger, car le développement d'un pays ne peut se produire sans l'implication des femmes dans l'espace public. Seule l'éducation peut garantir l'engagement et l'émancipation des femmes. C'est aussi ce que tente de faire voter l'actuel Gouvernement, par le projet de loi portant sur la « protection des jeunes filles en cours de scolarité », en imposant la scolarité obligatoire jusqu'à 16 ans.
Karine Dyskiewicz, responsable d'une ONG au Niger